Le Dr Bensaada dissèque le discours de l’organisation islamiste appelée « Rachad »

ALGER – L’universitaire Ahmed Bensaada a disséqué le discours de l’organisation appelée « Rachad », qui regroupe d’anciens membres d’un parti islamiste dissous, concluant que ce discours possède « une expertise dans la propagande de guerre » selon « les cinq principes énoncés par le journaliste-essayiste Michel Collon ».

En se référant à la liste des cinq principes de propagande de guerre dressée par M. Collon: « Cacher les intérêts, Cacher l’histoire, Diaboliser l’adversaire, Se faire passer pour les défenseurs des victimes, et Monopoliser et empêcher le débat », le Dr Bensaada a jugé, dans une récente contribution, « intéressant dans la conjoncture actuelle d’analyser le discours du mouvement islamiste ‘Rachad’ à l’aune de ces cinq principes ».

Ainsi, le Dr Bensaada a cité, pour le premier principe, notamment les slogans « Nous ne cherchons pas le pouvoir », « Dawla madaniya, machi aaskaria » (Un état civil et non militaire), « Nous voulons sauver notre pays de la mafia » et « Nous sommes ouverts à toutes les idéologies ».

Il a estimé que ces slogans sont « en complète contradiction avec le passé politico-religieux des principales figures de ce mouvement (Rachad), de leurs relations douteuses avec la nébuleuse islamiste internationale, de leurs sympathies avec les djihadistes libyens et syriens et de leur appartenance à l’organisation islamiste internationaliste ‘Motamar El Oumma’ et son projet de califat ‘rachidiste' ».

Pour le second principe « Cacher l’histoire », le Dr Bensaada a indiqué que « le mouvement Rachad s’est forgé une réputation dans la falsification de l’histoire de la décennie noire », affirmant que les militants de ce mouvement « experts dans le ‘Qui-tu-quisme’ (…) s’évertuent à blanchir les terroristes et à noircir les militaires, à innocenter les djihadistes et incriminer l’armée algérienne ».

Il a ajouté que pour les inconditionnels de l’organisation subversive « Rachad », « les djihadistes qui ont pris les armes ne sont que des gentils touristes qui aiment la randonnée pédestre dans les maquis algériens, alors que les militaires sont des méchants qui n’aiment pas les randonneurs », qualifiant cela de « pitoyable inversion des rôles qui ne fait que remuer le couteau dans la plaie de milliers de familles qui ont perdu des êtres chers ». Pour lui, « occulter l’histoire et la métamorphoser, c’est une spécialité de Rachad ».

Le troisième principe de propagande de guerre « Diaboliser l’adversaire », est, selon le Dr Bensaada, « très commun dans le discours de Rachad », expliquant que dans ce discours « le gouvernement, les militaires, les responsables, tous sentent le soufre de l’enfer » et que « rien de bon n’a été accompli et ne sera jamais accompli par eux » et qu' »ils sont le mal personnifié ».

« Toute petite historiette est montée en épingle, saupoudrée de quelques +fake news+ présentées comme des vérités vraies, alimentant des heures interminables de diarrhées verbales hululées dans le cyberespace et sur Al-Magharibia, leur chaîne de propagande », a-t-il révélé, ajoutant: « On accuse de crimes, on invente des histoires, on exagère des évènements, on sort du contexte, on utilise fallacieusement des vidéos ou des images émouvantes tout en abusant du pathos ».

Pour le quatrième principe de la liste de M. Collon: « Se faire passer pour les défenseurs des victimes », le Dr Bensaada a indiqué que « Rachad se place toujours comme le défenseur de la veuve et de l’orphelin, du faible et du ‘zawali’, de l’opprimé et du pauvre (…) il les défend avec véhémence contre ‘l’ogre étatique’, ne ménageant aucun effort sonore pour ce faire ».

Il a ajouté, dans le même contexte, que « son rôle est facile, car il ne donne rien de concret, ni de tangible ou de substantiel (…) il n’utilise que sa parole, que des mots, que des palabres. Bref, que du vent », a-t-il déploré.

Enfin, le Dr Bensaada a indiqué, à propos du cinquième et dernier principe « Monopoliser et empêcher le débat », qu' »on ne peut pas nier que l’organisation intégriste « Rachad » est omniprésent sur le cyberespace, que ce soit sur les médias sociaux ou sur la chaîne qui leur sert d’organe de presse ».

Chercheur et enseignant, titulaire d’un doctorat en physique de l’université de Montréal (Canada), Ahmed Bensaada est auteur de plusieurs ouvrages, dont « Arabesque-enquête sur le rôle des Etats-Unis dans les révoltes arabes » (2015), son premier livre d’investigation édité au Canada, Belgique et en Algérie, ainsi que son livre-enquête, édité en 2020, intitulé « Qui sont ces ténors autoproclamés du Hirak algérien? ».